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Cultivons la curiosité

Parasite

Parasite

Après "The Host" en 2006, "Snowpiercer" en 2013, Boog Joon-ho réalise (et co-scénarise avec Han Jin-won) "Parasite" en 2019. Ceci marque son retour dans les salles obscures après la parenthèse controversée "Okja" de 2017. En effet, ce film n'avait pas bénéficié d'une sortie en salle, pour finalement être directement disponible sur Netflix. Ce qui avait engendré un débat sur le nom de "film" de l'œuvre. Ce film bénéficiant d'un nouveau mode de distribution a-t-il été handicapé pour l'obtention de la Palme d'Or en 2017 ? Nous ne le serons jamais.

Vidéo de LeHuffPost

Ce dont nous sommes sûr, c'est qu'une année après l'exceptionnel "Une affaire de famille", c'est à nouveau le cinéma Asiatique qui est récompensé de la Palme d'Or en 2019 avec le film que nous voyons aujourd'hui. Le film du Japonais KORE-EDA Hirokazu nous contait les déboires d'une famille pauvre, devenue forte en débrouille, actant parfois de façon illégale pour subsister. Mais ne se plaignant jamais de sa condition.

Boog Joon-ho décide lui aussi de suivre une famille pauvre. Depuis un plan foireux, Kim Ki-taek (Song Kang-ho) est au chômage. Vivant avec sa famille dans un sous sol n'ayant pour vue sur l'extérieur qu'un soupirail de verre. Tout ce petit monde participe comme il peut pour faire entrer de l'argent. Le réalisateur se permet un trait d'humour avec la recherche désespérée du sacro saint Wifi. Cependant, on constate que la famille a bien du mal à vivre convenablement.

La faute à une crise de grande ampleur, qui voit 50 candidats se jeter sur le moindre poste intéressant. Du coup, c'est la pizzeria du coin qui offre un modeste salaire à cette famille. Cependant, un ami de Ki-woo (Choi Woo-shik), va lui faire une proposition difficile à refuser. Le remplacer comme professeur d'anglais d'une lycéenne de bonne famille. Ce sera l'occasion de voir les talents de faussaire de sa sœur, Ki-Jung (Park So-dam), mais surtout une opportunité d'obtenir de l'argent facilement.

Quand le jeune homme constatera que Yeon-kyo (Cho Yeo-jeong) est une femme déboussolée, cherchant un professeur de dessin pour son fils Da-song (Jung Hyeon-jun), il élabore un plan qui va permettre, au fur et à mesure, à toute sa famille de devenir employée par les Park. Le patriarche devenant le chauffeur de Mr. Park (Lee Sun-hyun). La mère, Chung Sook (Jang Hye-jin) prendra la place de l'expérimentée gouvernante. C'est d'ailleurs elle qui sera la dernière à rejoindre le groupe, de façon à la fois drôle mais affreuse.

En sachant que Ki-woo est donc le professeur particulier d'anglais de Da-hye (Jung Ziso) et que Ki-Jung s'occupe d'offrir des cours de dessin au plus jeune Park. Toute la famille se retrouve donc au service d'une famille richissime. Sans que celle-ci ne se doute des liens de sang qu'ont leurs employé.e.s. Alors que le film est bien rythmé, et ne sombre pas dans le mélodrame, les personnages profitants pleinement de cette nouvelle vie qui se profile à eux.

Un soir d'orage, alors que l'immense bâtisse des Park (conçue par un grand architecte) appartient, un week-end seulement, aux Kim, une visite impromptue va faire basculer le récit vers le thriller. Ceci intervient pile au moment où les Kim profitent enfin correctement d'un moment de bonheur, se prenant, le temps d'une soirée, pour les riches qu'ils n'ont jamais étés.

Nous cesserons ici de vous raconter la suite de l'histoire, alors qu'il reste bien des choses à découvrir. Tout comme dans certains films de Danny Boyle, le changement d'ambiance sera brutal et arrivera sans avertissements. Tout le long des 2h15 de son film, Bong Joon-ho ne juge jamais ses personnages. Pourtant l'exercice de la satire sociale est délicat. Les riches sont déconnectés du monde réel, tandis que les pauvres essaient de viser haut, sans jamais se morfondre sur leur sort.

On ressent pourtant la différence de niveau social entre leurs employés et les Park. Avec ce gimmick de l'odeur. Dans sa partie finale, "Parasite" nous aura un peu fait penser à "Funny Games" de Michael Haneke. D'ailleurs à travers sa réalisation propre et sobre, le réalisateur Sud-Coréen rappelle son homologue Autrichien. Une des dernière scène du film ne manquera pas de vous marquer. Nous ne pouvons vous en révéler le contenu, mais on constate une fois de plus un différentiel entre riches et pauvres. L'insouciance et la superficialité d'un côté, contre la violence de la vie et la folie de l'autre.

Ce qu'il vous faut savoir, c'est que malgré ses 132 minutes, le film passe rapidement. La réalisation, le cast et la photographie sont au service d'un scénario prenant, qui offre des surprises. Sans jamais juger ses personnages, le réalisateur permet même aux spectatrices et spectateurs de s'attacher à ces personnages. On retrouve cette même empathie chez la famille de "Une affaire de famille".

Et c'est ce qui impressionne le plus, cette empathie que l'on arrive à ressentir, malgré les plans illégaux imaginés par les Kim. Les sujets abordés le sont avec un ton juste. Bong Joon-ho se permet même une boutade concernant la Corée du Nord, sans jamais être lourd. Pourtant, c'est bien la différence des classes sociales qui est le principal thème du film. Tout ceci en essayant de nous montrer les points de vue des deux côtés. Il y est question de pauvreté, de chômage, de déconnexion des hautes classes aussi. Il y est aussi question de manipulation et de survie. Les pauvres montrant une incroyable intelligence et capacité d'adaptation, tandis que les riches aiment les limites et leur train-train quotidien.

Que dire, nous sommes ici en face d'un film marquant. Débutant tranquillement, presque comme une comédie, le ton tourne vers le milieu du film au drame. Nous vous conseillons d'aller voir ce film, même si vous n'aimez pas la VOSTFr (obligatoire car non doublé). Mais, car il y a un mais, allez le voir en forme et de bonne humeur. Alors que la seconde partie ne cessera de faire monter la tension, le final est marquant, même choquant. On ne ressort pas indemne de cette séance.

Film pourtant plaisant à voir, qui nous prouve qu'en plus d'avoir une musique pop désormais mondialement reconnue, la Corée du Sud possède en plus des cinéastes de grande qualité. Nous le savions avec "Old Boy" de Park Chan-wook, "Tunnel" de Kim Seong-hun, "Dernier train pour Busan" signé Yeon Sang-ho, et nous en oublions. Mais il faut reconnaître que Bong Joon-ho est capable de faire des films divertissants ("The Host", "Snowpiercer" ou "Okja") ou plus fort en émotion ("Mother" et donc "Parasite"). La Palme d'Or est amplement méritée devant une telle maîtrise cinématographique. Nous vous le répétons, mais c'est un film à voir. Et si nous pouvons nous permettre de vous conseiller d'autres films primés à Cannes, "Une affaire de famille" de KORE-EDA Hirokazu ou "La loi du marché" de Stéphane Brizé, qui racontent, chacun, la pauvreté, que ce soit en France, au Japon, ou en Corée du Sud (pour "Parasite" donc).

@+

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